Élire une constituante ? C’est une fausse bonne idée.

 

Le plus souvent pour changer de constitution on élit une assemblée qui en rédige une nouvelle. Ensuite cette nouvelle constitution est approuvée ou non par la population lors d’un référendum.
Cela semble logique et simple et c’est certainement mieux que rien, mais…

C’est mettre la charrue avant les bœufs.

Si on veut vraiment donner la parole aux gens il faut leur en donner le temps et les moyens.

Pour changer la constitution il faudra bien désigner quelques personnes pour la rédiger. On devra alors élire une constituante. Mais à la fin seulement : Cela doit être la dernière étape d’une longue réflexion et alors les constituants n’auront qu’à rédiger des synthèses.

Si on se contente d’élire une constituante on aura une campagne électorale qui risque de ressembler à n’importe quelle autre campagne : Pas de vrais débats mais une joute entre politiciens pendant quelques semaines. Et une fois passée l’élection, les débats auront lieux à l’assemblée. Nous ne feront qu’y assister passivement depuis notre télé.
Élire une constituante c’est commencer par la fin.

Les chiens ne font pas des chats.
Il est prévisible
que les « constituants » ne parleront que des règles du jeu politique : Du partage des pouvoirs entre les assemblées et le gouvernement ; du pouvoir donné au président ; du cumul des mandats ; on continue comme avant ou avec une petite dose de proportionnelle ?

Peut-on éviter cela par le recours au tirage au sort ou en s’assurant que les élus seront issus de la société civil en interdisant aux élus de se présenter  ?
Ce n’est pas parce que l’on aura élu ou tiré au sort des « gens comme tout le monde » qu’ils seront exemplaires. La position d’élu du peuple risque de leur monter à la tête. Et ils seront des proies faciles pour les lobbys et devront subir des pressions de toutes parts.
On peut aussi prévoir que les partis politiques présenteront des candidats « issus de la société civile ».

Ce qui importe le plus c’est que les débats ne soient pas circonscrits dès le début dans une assemblée, entre les mains de quelques centaines de personnes seulement.

Avant d’élire une constituante il faut se donner le temps et les moyens de réfléchir, de discuter.
Il faut que l’on puisse parler de sujets apparemment anodins auxquels des élus n’auraient pas pensé ou qu’ils n’auraient pas osé aborder. Dès que l’on est un élu, la parole n’est plus la même.
Les grands principes doivent aussi s’inspirer du quotidien.

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Si on se contente d’élire une constituante on ne réglera pas le problème de l’information. Cela ne changera rien à l’influence des médias qui sont majoritairement détenus par des grands groupes financiers. On devra encore subir ces débats où les candidats n’ont que trente secondes pour s’exprimer ; on verra encore les mêmes journalistes faire des commentaires insidieux pour orienter l’opinion l’air de rien.
Il faut du temps pour se faire un avis
sans être influencé par les partis,
sans être influencé par l’
opinion filtrée par les médias.

Une assemblée constituante ne favorisera pas les débats, elle aura très peu d’impact sur l’opinion des gens qui resteront certainement passifs. La plupart d’entre eux se diront qu’il n’y a plus rien à faire, il faut attendre la fin et après on votera.

La montagne accouche d’un souris.
Au final, on peut craindre que l’élection d’une constituante ne donne rien de concluant. Ce serait grave car on aura suscité de l’espoir pour décevoir encore une fois. Et ils seront encore plus nombreux ceux qui pensent que l’on ne peut rien changer démocratiquement.

L’élection d‘une constituante risque de tourner au plébiscite contre le gouvernement…
On peut craindre que de nombreux électeurs votent, non pour répondre à la question, mais pour sanctionner le gouvernement.